Émettre du CO2, est-ce violer les droits de l’Homme?


Les 47 entreprises les plus émettrices de CO2 sont accusées par 14 ONG de violer les droits de l’homme des Philippins. Cette plainte –une première quant au nombre de responsables- a été acceptée par la Commission des droits de l’homme de Manille.


Un article de notre  partenaire, le Journal de l’Environnement.

Après les gouvernements, au tour des entreprises d’entrer dans le box des accusés de la justice climatique. Les plus grands pollueurs de la planète, dont les entreprises françaises Total et Lafarge, ont 45 jours pour répondre de l’accusation portée par 14 ONG, dont Greenpeace Asie du Sud-est, 350.org Asie et Philippine movement for climate justice (PMCJ).

Soutenue par plus de 30 000 Philippins, la plainte a été déposée en septembre 2015 à la Commission des droits de l’homme (CHR) de Manille, qui l’a ensuite adressée le 27 Juillet aux PDG de 47 entreprises, comprenant ExxonMobil, Chevron, BP, Shell ou Glencore. Une fois le délai écoulé, la Cour pourra officiellement ouvrir une enquête, ce qui donnera lieu à une audience en octobre prochain et, le cas échéant, à des recommandations visant directement les États et les entreprises listées.

Atteinte aux droits fondamentaux

Dans le document de 65 pages adressé à la CHR, les plaignants affirment que «le changement climatique prive les Philippins de leurs droits fondamentaux». Ils citent notamment le droit à la vie, à une bonne santé physique et mentale, à l’alimentation, à l’eau, et à l’assainissement. Pour y remédier, ils demandent que «la responsabilité des principaux contributeurs au réchauffement soit reconnue». Et pour les identifier, ils se sont basés sur l’étude de Richard Heede, fondateur du Climate Accountability institute, qui estime que 65% des émissions anthropiques de CO2 depuis l’ère industrielle proviennent des 90 producteurs principaux d’hydrocarbures et de charbon dans le monde. Avec Chevron, ExxonMobil et BP en tête.

L’argumentaire cite aussi l’enquête du site Insideclimatenews, publiée en septembre 2015, selon laquelle Exxon connaissait les conséquences de l’accroissement de gaz carbonique dans l’atmosphère dès l’été 1977. Une enquête a d’ailleurs été ouverte en novembre 2015 par le procureur de l’État de New York.

Le préambule de l’Accord de Paris est bien sûr rappelé, dans la mesure où il est le premier traité environnemental à évoquer le respect des droits de l’homme dans le cadre de l’action climatique.

Catastrophes climatiques à répétition

Ce n’est pas un hasard si cette plainte est déposée aux Philippines. L’archipel a été fortement touché par le typhon Haiyan, en novembre 2013, qui a fait plus de 6 000 morts et 2 000 disparus.
Entre 2000 et 2008, les catastrophes climatiques ont représenté 78% des décès dus à des événements extrêmes aux Philippines.

Vers la reconnaissance d’une responsabilité climatique?

Par cette action, Greenpeace espère répéter la victoire historique du 24 juin 2015, lorsqu’un tribunal de La Haye a condamné l’État néerlandais pour sa politique insuffisante de réduction des émissions de gaz à effet de serre. À l’origine de cette action, l’ONG Urgenda avait déposé une plainte collective au nom de 900 citoyens.

Aux États-Unis, la Cour supérieure de l’État de Washington a reconnu de son côté, en novembre dernier, la plainte de 8 jeunes Américains visant l’inaction climatique du département en charge de l’écologie.


Si ces actions judiciaires visent le plus souvent à mettre les gouvernements face à leurs responsabilités, certaines plaintes ont ciblé les entreprises. C’est le cas de l’association américaine des producteurs de pétrole et de carburants et de l’institut américain du pétrole dans une affaire portée en avril 2016 par le climatologue James Hansen devant une Cour de l’Oregon.

Source : http://www.euractiv.fr/

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